Le travail en pâture

Jusqu’ici je travaillais toujours mes chevaux dans un lieu dédié à ça (carrière, rond de longe …). Depuis que j’ai Hermès, je suis dans une pension où l’accès aux installations est éloigné (20 minutes environ), ce n’est pas forcément loin, mais disons qu’en hiver, on a pas forcément envie de s’éterniser dans le froid.

J’ai donc pris l’habitude de travailler dans le pré, pour optimiser mon temps de présence.

C’est un sujet qui peut donner lieu à des interrogations sachant que c’est le lieu de vie de notre cheval.

Est-il correct vis à vis de lui de le faire travailler dans sa maison ?

Tout l’hiver nous avons travaillé en pâture avec Hermès, j’ai donc pu tester pas mal de choses et observer les résultats.

Les problématiques

Commençons par les choses qui posent problème car il y en a très peu ahah

Hermès vit actuellement avec 3 autres poneys, Eglantine, Espoir et Sylver. Le groupe est assez soudé et les individus s’entendent bien. Ils font quasi toutes leurs activités ensemble et se font confiance. Le groupe est assez équilibré.

Lorsque je travaille dans le pré, le premier souci, ce sont les autres chevaux. Être isolés en carrière permet tout de même une certaine tranquillité. D’autant que si jamais il y a un autre cheval, il n’est pas laisser à lui même et un humain s’occupe de lui.

Le « souci » d’un groupe soudé, c’est que dès qu’il se passe quelque chose dans le pré, on se prend tous les poneys dans les bras… ^^

La difficulté première que j’ai eu en bossant dans la pâture, a été d’apprendre aux autres à ne pas venir. Chose plus facile à dire qu’à faire, car même s’ils savent que je vais les chasser s’ils approchent trop, il y a toujours un petit curieux pour venir voir ce que l’on fait (ou manger mes plots ou tirer la queue d’Hermès… Bref x) ).

Deuxième inconvénient, le fait de travailler en pâture n’oblige pas le cheval à sortir de sa zone de confort. Il ne voit que ce qu’il connaît, reste avec des copains à proximité et il n’y a quasiment aucun élément perturbateur.

Mine de rien toutes ces choses nécessitent un apprentissage et je pense que bosser dans un endroit dédié à ça permet grandement de travailler là dessus. Tout dépend des objectifs de chacun, néanmoins pour moi ce sont des grandes lignes essentielles et qui doivent être acquises rapidement.

Je n’ai jamais eu de souci avec Hermès car il est assez fixé sur moi et quitte ses copains sans aucun problème, il n’est pas vraiment peureux et plutôt placide donc on peut dire que c’est un poulain facile à gérer pour ces 3 principes (éloignement des copains/calme/endroits nouveaux).

Je veille à garder ce contact régulier avec l’extérieur et à le séparer des autres pour qu’il garde l’habitude et que cela reste une situation sans stresse (petits brouting, donner la ration à l’extérieur du pré, partir faire un petit tour).

Quand je parle de travail, cela peut aussi concerner les soins. Par exemple, je donne le vermifuge en pâture.

Moment de jeu entre Hermès et Espoir

Est-ce légitime de l’embêter avec ça dans son pré ?

C’est une question qu’on m’a déjà posé plusieurs fois sur Instagram et ma foi, personnellement je ne vois pas le problème. Les chevaux organisent toute leur vie dans leur pré/pâture. Certes, nous ne sommes pas toujours avec eux et leur organisation ne nous prend pas en compte, mais c’est pour eux un lieu de vie à part entière. J’essaie au maximum de limiter les choses désagréables dans le pré, car je me dis que dans mon cas, j’aime bien qu’on me fiche la paix quand je suis chez moi. Mais parfois c’est finalement le lieu le plus adapté à la situation.

Les avantages

Cela nous amène à la réflexion suivante, leur pré est un endroit qu’ils connaissent et qui les rassure (théoriquement!).

Pourquoi donner le vermifuge à Hermès dans sa pâture alors qu’il a horreur de ça ?

Tout simplement car comme ça, il n’a pas a gérer d’élément extérieur et que lorsque c’est fini, je le laisse immédiatement retourner voir ses copains. Cela permet d’écourter au maximum cette manipulation dont il a horreur et de la rendre la plus tranquille possible (+ le medical training qui aide beaucoup!).

Toujours dans le même esprit, sachant que je bosse quasi-exclusivement en liberté quand il ne sort pas du pré, il sait qu’il a le choix à 100 %. Généralement j’installe 2-3 trucs dans le pré ou sort la cible de la voiture et le voilà qui débarque.

C’est très gratifiant de constater que son cheval vient nous voir quelque soit le programme et sans contrainte aucune. Il vient car il a envie.

Si nous avions ce passage Pré > Carrière, ce serait un peu différent. Jusqu’ici je ne voyais pas du tout la chose sous cet angle, d’autant que mes chevaux sont toujours venus me voir quand j’arrivais, mais j’avoue que ce côté 100 % choisi de venir travailler qu’a Hermès, me plaît beaucoup.

Photo d’Hermès qui m’aide à ramasser les crottins, Octobre 2018

Au même titre s’il en a marre, il peut partir. Vraiment.

Cela arrive très peu qu’il s’en aille avant la fin d’une séance (à vrai dire ce n’est arrivé qu’une seule fois, le gérant est passé nourrir et Hermès est parti le voir au bout de 10min… ^^), mais si c’est le cas, je le laisse partir.

En carrière je pourrais juste attendre qu’il revienne, faute d’autre occupation, mais dans le pré, il a des choses à faire. Donc s’il souhaite partir c’est que quelque chose de plus intéressant pour lui l’attends (manger du foin, jouer avec ses copains, brouter…) et encore une fois, j’aime qu’il ait le choix. C’est un peu le reflet de ce qu’il pense de nos séances à mon sens, je suis assez intéressante pour justifier qu’il reste là.

Travailler en liberté ce n’est pas forcément avoir un cheval nu, c’est avoir un cheval qui peut décider.

L’avantage le plus flagrant que nous avons à bosser dans le pré, c’est que le cheval n’a « rien » d’autre à gérer que son humain.

Hermès est toujours hyper dispo pour toutes mes demandes et beaucoup plus expressif que lorsque nous allons dans le rond de longe par exemple.

Le pré est un endroit qui n’a pas de secret pour lui et où il se sent vraiment en sécurité (on peut très bien avoir ces avantages dans n’importe quel autre lieu d’ailleurs suivant les habitudes de chacun). Il est attentif à 100 % à ce que je lui propose et concentré sur ce que l’on fait.

Travailler, mais pas que !

Et oui, il n’y a pas que ça dans la vie et c’est encore plus vrai pour un poulain (bon ok grand poulain qui prend 3 ans, mais quand même!). Nos séances sont au nombre de 1 à 3 par semaine en général, elles durent en moyenne une dizaine de minutes. C’est tout.

Faire bosser un poulain, c’est important pour de nombreuses raisons (manipulations, habituation aux différentes situations, début de travail à pieds etc.), néanmoins je pense qu’il y a tout de même beaucoup de choses à prendre en compte, notamment le travail mental que cela leur demande. Il ne faut pas oublier qu’ils ont énormément de choses à gérer physiquement et que chaque séance est pour eux une mine d’information à traiter. L’un des avantages énorme avec un poulain, c’est qu’ils sont en plein apprentissage, pour tout. Crée du lien, avoir des interactions et trouver sa place font aussi parti de cet apprentissage.

Le pré est donc aussi un endroit où nous travaillons notre relationnel.

Cela m’amène à aborder la question de la relation que j’entretiens avec Hermès.

J’ai toujours été une grande fan de « faire du rien » (ne rien faire c’est déjà faire quelque chose !).

Rester auprès de lui lorsqu’il broute, le gratouiller, l’observer jouer avec ses copains, m’asseoir près de lui quand il dort, tout cela crée du lien.

Aller dans le pré sans ne rien attendre de particulier permet aussi de le voir interagir « au naturel » avec ses copains et son environnement. Il est beaucoup moins influencé dans ses comportements, cela me permet de réellement apprendre à le connaître et parfois même de comprendre l’origine de certaines réactions.

J’ai toujours adoré passer du temps avec mes chevaux au pré, je pouvais y rester des heures quand j’étais gamine. Après ma coupure du monde équestre, retrouver ce genre de petits plaisirs, ça n’a pas de prix !

L’autre avantage a passé du temps dans le pré avec Hermès et les autres, c’est que lui aussi peut m’observer. Typiquement lors d’une situation où le groupe part un peu en live pour « insérer un monstre effrayant, mangeur de poneys », je reste assez stoïque (sachant que je ne risque pas de me faire manger par le dit monstre) et ça a pour effet de calmer Hermès assez rapidement, ainsi que les autres par la suite.

Hermès est particulièrement proche des Hommes (et de moi évidemment), c’est un tempérament qui aide beaucoup, mais tous ces moments passés avec lui renforcent la confiance qu’il a en moi.

La base d’une relation de confiance (avec qui que ce soit) est de simplement passer du temps ensemble et d’apprendre à se connaître. J’agis avec Hermès comme j’agis avec mes ami(e)s, nous ne sommes pas forcément obligé de faire quelque chose pour passer un bon moment et apprécier d’être ensemble. Je dois dire que j’ai beaucoup de mal à comprendre tous ces principes de « complicité » et « connexion » car à être complètement focalisés là dessus, la plupart oublient les règles de bases d’une relation solide. Ce ne sont pas des choses qui s’apprennent, mais qui se créent, qui prennent du temps. Tout ce qui dure longtemps est long à construire.

Le pré reste un endroit dédié à la tranquillité de nos poilus, mais utilisé à bon escient c’est aussi un lieu parfait pour développer une amitié réelle avec son cheval.

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2 commentaires

  1. ça, c’est ce que j’appelle un excellent article 🙂
    Je me souviens qu’il y a quelques années, c’était un débat qui revenait régulièrement sur le forum CA mais, partant du principe que les chevaux n’étaient pas territoriaux, au final c’était simplement un lieu neutre. Je trouve que tu soulèves un peu particulièrement intéressant que j’ai aussi bien vu avec mon cheval : le fait qu’il puisse s’en aller librement, sans avoir de punition (même neutre, style se retrouver sans aucune stimulation dans un rond de longe), est hyper important. ça veut tout de même dire qu’il trouve plus intéressant d’être auprès de son humaine que de ses copains, du foin, de l’herbe et ça c’est énorme !
    ça nous oblige à vraiment travailler sur nous-mêmes puisqu’on a intérêt à devenir et rester un pôle intéressant ^^

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